ven. 21 févr. 2025
Le blog de Bernard Keppenne : « Compliqué d’anticiper l’impact des hausses des tarifs douaniers »
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Les chiffres d’inflation au Japon, publiés ce matin, confirment que le processus d’ajustement monétaire n’est pas terminé et ont renforcé le scénario d’une nouvelle hausse des taux sur la seconde partie de l’année.
Inflation au Japon
L’inflation de base a atteint un taux de 3.2 % en janvier, son rythme le plus rapide en 19 mois, et l’indice hors aliments et énergie a augmenté de 2.5% sur la même période.
Par contre, l’inflation des services a augmenté de 1.4 %, ce qui représente un ralentissement par rapport à la hausse de 1,6 % enregistrée en décembre, ce qui laisse dès lors un peu de temps à la BOJ avant d’agir.
Les taux obligataires en hausse après ces chiffres ont été bridés par les propos du gouverneur de la BOJ, Kazuo Ueda, qui a déclaré que la Banque centrale était prête à augmenter ses achats d’obligations pour freiner la hausse des taux long terme.
Il a déclaré au Parlement que si l’évolution des taux obligataires est en phase avec les perspectives économiques cela ne posera aucun problème à la BOJ, « mais si les marchés prennent des mesures anormales et entraînent une forte hausse des rendements, nous sommes prêts à réagir rapidement pour stabiliser les marchés ».
Il faut dire que la hausse des rendements obligataires s’est fameusement accélérée depuis la mi-2024 aussi bien à 2 ans qu’à 10 ans.
Indices PMI
Les indices PMI seront publiés ce matin en zone euro et ils devraient légèrement progresser, mais sans grand enthousiasme.
Il faut dire que les facteurs d’incertitude sont nombreux, et que les marchés scruteront surtout avec beaucoup d’attention les résultats des élections qui se tiennent en Allemagne ce week-end.
Les sondages donnent la CDU/CSU en tête, mais elle lui faudra composer avec d’autres partis pour former un gouvernement, alors que le parti AFD deviendrait la deuxième force politique du pays.
Pour rester sur les indices PMI, en Inde, l’indice composite a fait un bond en février passant de 57.7 à 60.6, tiré essentiellement par l’indice des services qui est passé de 56.5 à 61.1, alors que l’indice manufacturier a légèrement fléchi à 57.1 contre 57.7.
Le secteur des services a connu une augmentation significative des nouvelles affaires, et les créations d’emploi ont été soutenues.
Risque de stagflation ?
Hausse des tarifs douaniers qui provoque une hausse de l’inflation couplée à une baisse de la croissance, ce scénario pourrait devenir réalité aux Etats-Unis.
J’ai déjà signalé le recul de la confiance des ménages américains, qui commencent tout doucement à mesurer que les annonces de hausse des tarifs douaniers ne seront pas indolores pour leurs portefeuilles.
Dans ce contexte, il est interpellant de voir que Walmart, le plus grand détaillant du monde, ait annoncé, hier, prévoir des ventes inférieures aux attentes pour l’année fiscale qui se termine en janvier 2026.
Il prévoit une hausse de ses ventes de 3% à 4% sur un an, chiffre en dessous des prévisions des analystes. Cette prudence s’explique par les chiffres très décevants des ventes de détail en janvier, reflet ou pas des inquiétudes des consommateurs sur l’impact de la hausse des tarifs douaniers.
Ce risque de stagflation ressort aussi implicitement des propos de certains membres de la FED ces derniers jours.
Ainsi, Adriana Kugler, gouverneure de la FED, estime que les risques de hausse de l’inflation demeurent et que dès lors « à l’avenir, je considère qu’il est approprié de maintenir le taux des fonds fédéraux pendant un certain temps, compte tenu de l’équilibre des risques auquel nous sommes confrontés actuellement ».
Un autre membre de la FED, le président de la FED d’Atlanta, Raphael Bostic, en parlant du risque de voir les entreprises répercuter les hausses des tarifs douaniers constate que « les contacts sont préoccupés par le fait que les droits de douane pourraient augmenter les coûts. Nombre d’entre eux sont convaincus que si cela se produit, ils pourront répercuter la hausse des coûts sur leurs prix ».
Alberto Musalem, président de la FED de Saint-Louis, s’inquiète aussi du risque que l’inflation demeure durablement au-dessus des 2% et constate que « le marché et certains sondages indiquent que les attentes d’inflation à court terme ont augmenté de manière significative au cours des trois derniers mois ».
Et dès lors, si l’inflation reste bloquée aux niveaux actuels, supérieurs à l’objectif, ou si les attentes augmentent, « une trajectoire plus restrictive de la politique monétaire par rapport à la trajectoire de base pourrait être appropriée ».
Austan Goolsbee, président de la FED de Chicago, s’est aussi inquiété des risques que font peser les hausses des droits de douane. En faisant une comparaison avec le premier mandat de Trump, il souligne que, lors de son premier mandat, les impacts avaient été assez limités parce qu’ils étaient plus modérés et comportaient pas mal d’exceptions.
La situation semble totalement différente cette fois-ci et Goolsbee de mettre en garde « tout dépend du nombre de pays auxquels ils vont s’appliquer et de leur ampleur. Et plus cela ressemble à un choc de la taille de COVID, plus il faut être nerveux à ce sujet ».
Source : Bernard Keppenne, Chief Economist - CBC Banque & Assurances